J’ai raconté par ailleurs ma découverte des Niwaki au travers de mes recherches et lectures, en particulier depuis 2010.
Après les avoir observés et avoir étudié comment ils sont réalisés, le temps est bien vite venu de passer à la pratique, non sans une certaine crainte de mal faire, de blesser la plante, de ne pas avoir le résultat escompté …
Comme bien souvent dans ce cas, j’hésite avant de me lancer, j’analyse, j’étudie, je pèse le pour et le contre comme on dit, c’est plus fort que moi 🙂
J’aborde cela comme une sculpture végétale, je vois cela comme une forme d’art, et cela ne laisse pas de place aux doutes, l’oeuvre sera unique, le geste doit être juste et réfléchi.
En avant pour la première expérience sur plante en pleine terre!
A la sortie du printemps 2013, trois conifères du « parterre en Lune » commencent à s’étendre, si je ne fais pas d’intervention ils vont se toucher sous peu.
Ils ont une dizaine d’années de croissance, et depuis toujours mon épouse et moi veillons à ce que chaque plante ait de la place pour s’épanouir, en restant isolée autant que possible.
Depuis quelques années déjà, nous les avons éclaircis par le bas, cela s’est imposé naturellement à nous grâce à la structure des branches, mais cela ne nous suffit plus.
L’envie de pratiquer la mise en forme de Niwaki se confirme, et les premiers sujets d’application sont tout trouvés grâce à leur structure naturelle!
Un dôme, des branches plutôt horizontales…
Juin 2013, une taille de mise en forme est pratiquée sur les trois plants alors que les jeunes pousses sont en pleine croissance. Je fais surtout du nettoyage des troncs et des branches basses, en touchant à peine à la masse supérieure de la végétation.
Le premier effet me satisfait, et je suis bien conscient qu’il faudra retravailler ces nuages durant quelques années avant d’avoir un aspect plus soigné et fini, mais j’arrête de tailler, stop, ne pas trop en faire et regretter un mauvais geste!
Le premier résultat me parait encourageant et l’aventure se poursuivra, ce n’est qu’une première expérience de réalisation, il y a tant à apprendre, le chemin est entamé …
Mettre en valeur ces troncs sinueux et avoir les vides qui font apparaître les nuages est vraiment plaisant, la plante se révèle peu à peu, un potentiel se révèle de suite sur cet Abies Koreana car il semble tout naturellement fait pour être structurée en nuages, tandis que pour moi c’est une découverte.
En septembre 2013, les croissances d’été sont terminées, je redonne un coup de structuration dans les nuages formés trois mois plus tôt, cette fois en donnant plus de forme sur le dessus des plantes.
Les masses se mettent en place.
Prudemment, peur d’aller trop vite et de couper trop fort, mais je vois déjà ce que cela va pouvoir donner à l’avenir… Les masses se densifient dès la première année de structuration et de taille, cela donne envie de voir évoluer ces masses dans le temps, je me projette dans le futur, j’imagine la suite, l’impatience pointe le bout de son nez mais il faut laisser agir le temps.
Une année se passe sans toucher mes trois conifères, je laisse cette fois les pousses de printemps et d’été faire leur oeuvre.
Je taille en septembre 2014, bien dans la masse des nuages, et on se rapproche alors plus de l’apparence recherchée au départ: des nuages assez denses, qui ne se touchent pas, dégageant selon moi une sensation de force, de sérénité.
Il faut jouer avec les pleins et les vides, trouver un équilibre entre eux, tailler progressivement, après de multiples interruptions pour prendre du recul, évaluer le potentiel de la plante, tourner autour d’elle pour en cerner toutes les facettes… Mes sapins de Corée semblent posés là, bien encrés, stables depuis toujours.
La pratique confirme ce que bien des personnes qui ont réalisé des Niwaki annoncent: structurer un Niwaki ne se fait pas en une coupe, et prend souvent plusieurs années pour avoir un résultat encore plus satisfaisant (pour parfois demander une vie de travail, voir même la vie de plusieurs jardiniers, mais ceci relève d’une pratique que je ne fais que d’effleurer à ce stade). Mais le résultat vaut la peine, patience est le maître mot.
L’âge des trois conifères (dix ans au début de la mise en forme) a permis ici un résultat assez rapide.
Après deux ans, je peux dire que les tailles de structuration sont terminées, il me reste une ou deux tailles d’entretien par an, pratiquées après les périodes de croissances en début et/ou fin d’été.
A chaque fois le plaisir de redonner une apparence bien nette aux nuages est présent!
Septembre devient un mois que j’apprécie particulièrement, car on peut voir le résultat du travail de la nature (les croissances annuelles) et de l’homme (la taille de nettoyage) après les périodes annuelles de croissance.